Sanja Mitrovic réunit pour cette création deux mondes – football et théâtre – avec apparemment pas grand-chose en commun. Do You Still Love Me ? traite le théâtre et le football simultanément pour considérer les notions de communauté et d’appartenance, ainsi que l’importance de l’amour dans ses nombreuses complexités et incarnations contradictoires. Quatre supporters de football et quatre acteurs-performeurs sont ensemble sur scène pour interroger leurs passions, ce en quoi ils croient vraiment, et à quel prix…
« Je suis fascinée par les mécanismes d’identification qui structurent le sentiment d’appartenance à un groupe ou à une communauté. Supporter le football est souvent associé à l’hooliganisme et à la violence, mais ce qui m’intéresse est l’idée de l’amour comme composante de cet élan ». Do You Still Love Me ? est un spectacle sur l’amour dans sa forme la plus obsessionnelle. Le spectacle traite le thème de l’extrémisme, qui apparaît dans beaucoup de travaux de Sanja Mitrovic D’après elle, le véritable amour ne tolère pas l’extrémisme. « Même à de faibles taux, l’extrémisme de tous les jours est dangereux, qu’il s’agisse de louer ton pays, glorifier ton drapeau, ou idolâtrer ton club de football. Tu tentes de prouver ton amour en acclamant aveuglement un sujet, mais cela n’est pas le véritable amour. Le véritable amour réside dans une distance critique. C’est une réflexion critique qui te permet d’aimer quelqu’un, ou quelque chose, encore plus avec ses défauts ».
Sanja Mitrovic est née et a grandi en Serbie. En 1999, sa vie change, quand la première bombe de l’OTAN tombe sur la ville de Belgrade, dans laquelle elle vit à ce moment-là, point marquant dans la série des guerres civiles qui avait commencé à séparer l’ex-Yougoslavie à partir de 1991. Les guerres civiles ont imposé leurs propres récits et Sanja Mitrovic expérimente les moyens par lesquels les serbes – tous les serbes – sont assimilés aux mauvaises personnes de l’Europe. « Beaucoup de choses se passaient en mon nom. Des mouvements politiques sont apparus, auxquels je ne voulais pas être associée. Malgré cela, j’ai été qualifiée de mauvaise serbe. » Dans la gravité des événements qui se déroulent autour d’elle, elle ressent le désir de développer sa propre voix et son propre vocabulaire. La colère est son impulsion initiale qui, avec les années, se heurte et se répand dans d’autres histoires universelles. Petit à petit, elle renonce à celle-ci, la remplaçant par sa curiosité pour le fonctionnement des mécanismes politiques et humains.