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Bienvenue à la Friche
Aujourd'hui vendredi 21 nov.
En 2015, la Friche lance le programme Résidences Méditerranée avec l’Institut Français du Maroc. Depuis, une cinquantaine de jeunes artistes de nombreux pays du sud de la Méditerranée ont bénéficié de ce dispositif leur permettant de séjourner 3 mois à la Friche avec un accompagnement de l’une de ses structures résidentes.
Chaque artiste bénéficie alors d’un espace de production adapté à son projet et aux formes qu’iel développe. Un accompagnement personnalisé est mis en place via l’implication d’un·e accompagnateur·ice tout au long de la résidence, permettant des moments de parole et de « critique » qui ouvriront des espaces de réflexion à chacun·e.
Sofiane Byari, ne conçoit l’art que collectivement. Quand on lui pose des questions, il pointe ses ami·es, et ses dessins – ils et elles expliqueront mieux que lui. Alors, la joyeuse communauté qui l’entoure cette après-midi se prête au jeu de le raconter.
“ La maladie qui soigne : expérience collective menée par l’artiste Sofiane Byari avec sa bande fouteuse de zbeul. ” C’est l’affichette collée sur la porte du grand atelier cet après-midi là. À l’intérieur, Sofiane a disposé tous ses “monstres”, ceux qu’il dessine depuis toujours, depuis les marges de ses cahiers d’enfants, jusqu’aux désert de Boujdour au Sahara occidental, en passant par l’école coranique, la caserne militaire et l’école d’art de Tétouan et Casablanca. Ses monstres l’aident à se concentrer et à gérer ses angoisses et ses peurs, qu’il préfère les montrer au grand jour, comme une maladie qui soigne : en argile, en déchets ou en bois, arrosés d’eau, enfermés dans une cage ou à détruire à l’aide d’un lance-pierre ou d’un pistolet à bille.
Dans l’atelier, il y a ses monstres, mais aussi ceux de ses copains ou d’enfants, qu’il a invité à créer avec lui pendant sa résidence. Dans l’espace d’exposition, un ami sort une guitare, un autre est venu poser un rap. Ça rit, ça chante, dans une joyeuse effervescence. Pour Sofiane, l’art est collectif et quand on lui pose des questions, il montre systématiquement les autres. Pour la plupart, il les a rencontré·es à la fin de l’été, lors des manifestations en soutien au mouvement marocain du collectif “Gen Z 212”, qui dénonce la précarité des services publics et la corruption du royaume.


Une communauté artistique et politique
« Avec les manifs Gen Z, on est en train de créer une vraie communauté marocaine à Marseille, ça fait du bien de se retrouver. » raconte Lamia R, qui déambule dans l’espace, un verre à la main. Elle montre une vidéo et un photozine, réalisés pendant la résidence de Sofiane. Dedans, des images de vendeurs à la sauvette de Noailles, de Belsunce, de très très près. Des cigarettes sont échangées sous le manteau, des médicaments parfois, et la police, souvent. Selon elle, la rencontre avec Sofiane est aussi politique : « Ce qui nous rassemble, c’est la rage. D’être dans un pays où on n’aime pas les étrangers. J’ai des ami·es qui attendent toujours les papiers, alors qu’iels contribuent à la société, ou qui galèrent à trouver du travail ».
Mehdi Black Wind a rappé un texte engagé sur la vidéo de Lamia et aussi celle de Sofiane, – un œil fait de déchets, qui s’ouvre et se ferme dans une régularité hypnotique. Il raconte : « C’est intéressant artistiquement, de créer depuis l’exil et toutes les questions que ça pose. On croise rarement des artistes comme Sofiane, qui ne viennent pas des grandes villes, qui sont accueillants comme ça. J’aime ce qu’il incarne, une vision de l’art brut, où il ne fait pas semblant ». Enfin il y a Ismael, Was Was, qui a réalisé la musique de pas mal des vidéos et derrière les platines pour l’occasion : « J’ai été là humainement, et j’ai mis un peu de lumière sur pas mal de choses. C’est comme si tu me racontais un rêve et que je te suis dedans. » résume le compositeur. Un rêve devenu une réalité très collective.
Ce qui nous rassemble, c’est la rage. D’être dans un pays où on n’aime pas les étrangers. J’ai des ami·es qui attendent toujours les papiers, alors qu’iels contribuent à la société, ou qui galèrent à trouver du travail



DÉCOUVRIR LE TRAVAIL DE SOFIANE BYARI
Instagram : @byarisofiane
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